l'énigme et les personnages qui ont cotoyés l'histoire |
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PERSONNAGES
Personnages monsieur Lawrence | Personnages Antoine Coll |
Personnages monsieur Rouzaud |
En cette fin de soirée du samedi 14 octobre 1950, dans le petit village audois de Peyrolles, la température est suffisamment clémente pour que Charles Thérez décide d’aller à pied jusqu’au bourg voisin de Serres afin d’aller saluer quelques amis au café Doutre et, pourquoi pas, y disputer une partie de cartes ou deux. Demain, dimanche, il pourra faire la grasse matinée et il sait que, comme à l’accoutumée, son épouse le réveillera avec un bon bol de café bouillant qu’il dégustera dans son lit. C’est donc d’humeur guillerette que Charles Thérez quitte la ferme familiale après avoir embrassé sa femme et ses enfants. Dimanche matin, les cloches de l’église du village ont réveillé Madame Thérez de bonne heure et, après avoir préparé le café, elle se dirige vers la chambre d’ami occupée par son mari pour lui apporter son petit-déjeuner. En effet, depuis quelques mois, les époux font chambre à part car la vieille mère de Madame Thérez, impotente et aveugle, a été accueillie au foyer et sa fille doit fréquemment s’occuper d’elle en cours de nuit. Son mari devant se lever tôt le matin pour s’occuper des vignes et des travaux de la ferme, ils ont donc décidé, par confort, de dormir séparément. Lorsqu’elle pénètre dans la chambre de son époux, Madame Thérez est surprise de constater que le lit est inoccupé. Il n’a même pas été défait... son mari n’a pas dormi à la maison. Inquiète, car cela ne lui est jamais arrivé, elle demande à Michel Rousset, un voisin, s’il peut se rendre en vélo jusqu’au village de Serres afin de vérifier si son époux n’a pas passé la nuit sur place. Monsieur Rousset accepte volontiers, enfourche sa bicyclette et prend la route alors que le jour se lève sur la Haute-Vallée de l’Aude. À environ 300 mètres de l’entrée du village de Serres, Michel Rousset freine brutalement. Sur le bas-côté de la route, il vient d’apercevoir une forme allongée dans l’herbe. S’en étant approché prudemment, il laisse tomber son vélo à terre, en état de sidération... il vient de reconnaître le corps sans vie de son voisin, Charles Thérez, baignant dans une mare de sang. Un étranger à Peyrolles Charles Thérez n’était pas un enfant du pays. Arrivé à Peyrolles au milieu des années 1930, au terme d’un long parcours de « trimardeur » qui lui avait fait traverser une partie de la France, il avait fini par poser son pauvre bagage dans le petit village audois... il était enfin arrivé au bout de son chemin. Sympathique, courageux et ne rechignant pas à l’effort, il fut d’emblée bien accueilli par les villageois pour qui une paire de bras solides n’étaient pas superflus. Finalement adopté par la population, il épousa une fille du pays et eu des enfants avec elle. Installés dans une grande ferme en bordure du village, ils exploitaient ensemble les terres et les vignes familiales à l’instar de la quasi totalité des habitants de la région. Un couple sans histoire, comme tant d’autres à Peyrolles. L’enquête
Les premières investigations judiciaires furent effectuées par les gendarmes de Couiza et de Limoux, sous le commandement du capitaine Lacaje. Il fut ainsi établi que Charles Thérez avait quitté son domicile le samedi aux alentours de 20h00 et qu’il n’avait en aucun cas prévu de rester dormir à Serres. La victime était unanimement décrite comme un homme affable et sympathique et personne, dans son entourage proche, ne lui connaissait d’ennemi. Charles Thérez Rapidement, le procureur de la République Costesègue, du parquet de Carcassonne, fit ouvrir une information judiciaire et ce fut le juge d’instruction Sagols qui en reçut la charge. Le magistrat instructeur délivra commission rogatoire au commissaire de police Séménou de Limoux qui, secondé par les inspecteurs de la brigade mobile de Montpellier, reprit à son compte l’enquête initiée par les gendarmes. Un point de détail important fut alors mis en évidence par les policiers. Le témoin, Michel Rousset, celui qui avait découvert le cadavre de son voisin sur le bas-côté, indiqua que, la veille au soir, c’est-à-dire le samedi vers 20h30, alors qu’il revenait de Serres et rentrait à Peyrolles sur sa bicyclette, il avait aperçu « une forme sombre » sur le bord de la route. La nuit tombant et étant en retard, il ne s’était pas arrêté, pensant qu’il s’agissait d’un ivrogne qui cuvait son vin. C’est en se souvenant de cette horrible coïncidence qu’il avait alors compris que c’était le corps de Charles Thérez qu’il avait entraperçu la veille. Il confia ce troublant élément d’enquête au commissaire Séménou qui put alors déterminer que la mort du malheureux était survenue entre 20h00 et 20h30 le samedi soir.
Le témoin Michel Rousset interrogé par le Capitaine Lacaje Le docteur Soum, médecin légiste, put établir les circonstances de l’assassinat. Selon ses constatations, la victime avait été attaquée, par surprise, alors qu’elle arrivait pédestrement à l’entrée du village de Serres et avait reçu deux coups d’un instrument contondant à la tête, portés avec une extrême violence. Le premier l’avait atteint au niveau du front et le second à la nuque... la mort avait été quasi-instantanée. Charles Thérez, bien qu’handicapé par une vieille blessure à la jambe, était un homme vigoureux et en capacité de résister à un agresseur... pour peu qu’il ait été confronté à lui. En l’occurrence, il fut véritablement pris dans un guet-apens qui ne lui laissa aucune chance de survie, la préméditation étant largement avérée. L’enquête de voisinage et les minutieuses recherches et investigations menées sur le terrain par les fonctionnaires de police ne permirent pas d’apporter d’éléments de nature à faire avancer l’enquête. Au terme de plusieurs mois, faute de suspect ou d’indices probants, le juge Sagols dût se résoudre à transmettre une ordonnance de non-lieu au parquet de Carcassonne... et le procureur Costesègue classa l’affaire. Les hypothèses Que s’est-il passé en ce début de nuit d’octobre 1950 sur la route de Peyrolles à Serres ? Pourquoi Charles Thérez, brave homme et honnête père de famille, fut-il victime d’une embuscade mortelle ? À ce jour, personne n’est en mesure de l’expliquer. Par la suite, comme souvent en de telles circonstances, les langues se délièrent et la région bruissa de théories et d’hypothèses aussi farfelues les unes que les autres. Deux, cependant, méritent d’être évoquées, car elles sont basées sur des faits possiblement crédibles à mettre en relation avec le passé, proche ou lointain, de la victime. Lors de l’enquête de voisinage, les inspecteurs de la brigade mobile apprirent ainsi que Charles Thérez, la veille de sa mort, s’était rendu au marché de Limoux et avait déjeuné, à l’hôtel Valent, avec un individu ne semblant pas être de la région. Avait-il rendez-vous avec cet homme mystérieux ? Ce dernier était-il en lien avec celui qui tendit le mortel guet-apens à l’entrée de Serres ? Nul ne put le dire, car cet « étranger » ne fut jamais identifié et la piste rapidement abandonnée par les enquêteurs, faute d’éléments supplémentaires. Dans le village de Peyrolles, bien plus tard, fut également évoquée une autre histoire ; une vieille affaire remontant à l’époque troublée de l’Occupation et de la Résistance. À la fin de la guerre, quelques maquisards espagnols, dont le camp de base était situé non loin de Rennes-le-Château, auraient eu l’opportunité de récupérer, à leur unique profit, un conteneur avec de l’argent qui venait d’être parachuté par l’aviation alliée. Charles Thérez aurait eu vent de ce détournement et l’un des espagnols aurait voulu le faire taire. Quel crédit donner à cette information ? Bien peu, il convient de le reconnaître. Elle entre tout de même en résonnance avec cette macabre découverte de trois squelettes, en 1956, dans les jardins de l’hôtel de la Tour à Rennes-le-Château. Les restes de trois hommes, âgés de 25 à 35 ans, dont la mort remontait à une quinzaine d’années tout au plus d’après ce qui ressortira de l’enquête des gendarmes de Couiza. Il a été dit, qu’à l’époque, des maquisards espagnols s’étaient réfugiés dans le domaine partiellement désaffecté de l’abbé Saunière et qu’une affaire de « trésor de guerre » aurait été la cause de leurs décès. Tout cela reste bien nébuleux, mais il est tout de même étrange de constater que le petit village de Peyrolles fut suffisamment attractif, en cette première moitié du XX° siècle, pour que deux « étrangers » décident de s’y installer définitivement. En effet, c’est également dans ce hameau, qui ne comptait qu’une cinquantaine d’habitants dans les années 1930-1940, qu’un citoyen américain du nom de Louis Lawrence acheta le moulin des Pontils, en 1917, et y vécu jusqu’en 1954. Un drôle de personnage qui, accessoirement, fit ériger sur une éminence rocheuse de l’un de ses terrains un bien étrange tombeau. Julien Lafourcade |
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